La deuxième édition de la Journée Romande pour l’éclairage extérieur (JEE) s’est tenue le 5 novembre à Lausanne, réunissant plus d’une centaine de spécialistes autour des thématiques de la mesure, de la réglementation et du design lumineux.
Texte et photos: Pierre Schoeffel
L’événement, organisé par la Société Suisse pour l’Éclairage (SLG), a permis de faire le point sur les avancées techniques et les défis liés à la transition énergétique et à la réduction des nuisances lumineuses.
La matinée a été ouverte par Grégory Bartholdi (SLG), qui a présenté les groupes de travail actifs sur les émissions lumineuses et les structures d’éclairage. Une nouvelle directive, SLG 401, est en préparation afin d’encadrer la réduction des émissions inutiles. Les résultats d’un sondage mené auprès des planificateurs montrent que 97 % d’entre eux jugent ce sujet essentiel, mais moins de la moitié le mettent en pratique, faute d’outils adaptés.
De nouvelles approches pour la mesure de la lumière
Les premières interventions ont ensuite porté sur les apports des drones pour l’évaluation de l’éclairage. Olivier Mettler (Vertical Master) a montré comment la cartographie 3D aérienne permet désormais de modéliser des zones entières avec une précision de quelques centimètres. Les dispositifs autonomes de type Drone Dock offrent de nouvelles possibilités pour le suivi des chantiers ou des installations lumineuses à distance.
Dans la continuité, Florian Stuker (METAS) a présenté le projet MetasDrone, soutenu par le Fonds national suisse, qui vise à créer un « drone gonio-photomètre » capable de mesurer la lumière dans l’espace tridimensionnel. Cette méthode promet une évaluation plus complète des émissions lumineuses, combinant mesures au sol, par drone et éventuellement par satellite.
Romain Chasseigne (Laboratoire National d’Essais, France) a complété cette approche en rappelant la nécessité d’un cadre de mesure harmonisé à l’échelle européenne. Il a souligné les effets multiples de la lumière artificielle – sur la santé, la biodiversité ou le ciel nocturne – et la difficulté d’établir des références communes entre pays.
Pour compléter les mesures terrestres classiques, il a présenté l’intérêt des campagnes aéroportées permettant de cartographier l’éclairement nocturne à large échelle. Cette technique, basée sur des capteurs photométriques embarqués, offre une vision homogène et comparable des zones urbaines et rurales. Elle permet également de détecter les évolutions temporelles et saisonnières, en apportant une base objective pour orienter les stratégies d’éclairage public.
Évolutions réglementaires et critères de performance
La matinée s’est poursuivie avec un retour d’expérience sur l’application de l’arrêté français de 2018 relatif aux nuisances lumineuses, présenté par Maxime Van Der Ham (Sarese). Ce texte impose des seuils de lumière au-dessus et au-dessous de l’horizontale, limite les températures de couleur à 3000 K, et fixe des horaires d’extinction selon les zones. Ces mesures, encore en cours d’adaptation, ont conduit les fabricants à revoir leurs optiques et les collectivités à repenser la planification de l’éclairage.
Florian Greffier (CEREMA) a poursuivi sur le thème de la luminance. Selon lui, la qualité d’un éclairage ne peut être évaluée uniquement en lux : elle dépend de la lumière perçue par l’œil humain. Travailler en luminance implique de tenir compte des propriétés de réflexion des revêtements et des conditions réelles de circulation. Cette approche systémique permet d’ajuster la quantité de lumière à l’usage, tout en limitant l’éblouissement et la consommation.
Subventions, cadre légal et retours de terrain
L’après-midi a été consacrée aux aspects institutionnels et aux retours d’expérience suisses.
Grégory Bartholdi a détaillé le programme Lightbank+, développé avec ProKilowatt pour soutenir la rénovation de l’éclairage sportif et extérieur. Ce dispositif fédéral facilite l’accès aux subventions pour les communes et associations, dans une logique d’efficacité énergétique.
Emmanuel Thony (EffEL c/o CimArk) a expliqué comment les fournisseurs d’électricité peuvent déclarer les rénovations (comme le passage à la LED ou l’éclairage dynamique) dans le cadre du programme EffEl. Il a détaillé les critères, les outils disponibles et présenté les bénéfices concrets pour atteindre les objectifs d’efficacité énergétique.
José Mettraux (Groupe E) a ensuite présenté la nouvelle loi fribourgeoise sur l’éclairage public, issue des réflexions menées après la crise énergétique. Elle impose l’extinction entre minuit et cinq heures, tout en garantissant la sécurité des passages piétons. Ce dispositif repose sur un pilotage par réseau et sur la modernisation progressive des armoires d’alimentation.
Jérôme Mayer, responsable du plan lumière de la ville de Fribourg, a illustré les impacts concrets de cette réglementation sur les projets urbains. Le plan, élaboré en concertation avec les services municipaux et les habitants, définit pour chaque secteur une politique d’éclairage adaptée : extinction, détection, abaissement ou mise en valeur patrimoniale. Ces choix visent à concilier sécurité, confort visuel et préservation de la biodiversité.
Design et intégration dans le paysage
En fin de journée, Davide Oppizzi (DCUBE Swiss SA) a présenté plusieurs projets de greentech design, où le luminaire devient un élément intégré de l’écosystème. Son approche privilégie la biodiversité et la circularité des matériaux, comme en témoigne le luminaire Nido, conçu pour accueillir des oiseaux grâce à un partenariat avec BirdLife International. D’autres développements, tels que les projets solaires Kubo et Dragon Solar, explorent la voie d’un design énergétique autonome et respectueux de l’environnement.
Enfin, Marc Aurel (Aurel Design Urbain) a clos la journée en évoquant les projets de la ville de Lausanne, dont la rénovation du Grand-Pont et de la place Saint-François. Ses réalisations mettent l’accent sur l’intégration patrimoniale et la cohérence urbaine, combinant maquettes à échelle réelle et validation sur site pour garantir une insertion harmonieuse de la lumière dans le paysage architectural.
Une journée placée sous le signe du dialogue
Cette deuxième édition de la JEE a confirmé la volonté des acteurs de l’éclairage extérieur de conjuguer innovation, réglementation et respect de l’environnement. Entre recherche technologique, coordination cantonale et design sensible, les échanges ont mis en lumière une ambition commune : construire un éclairage plus mesuré, plus intelligent et mieux intégré à nos territoires.
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Source du texte: Pierre Schoeffel
Source de l'image: Pierre Schoeffel
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