Qu’est-ce qui motive et préoccupe les apprentis de la branche électrique? Nous souhaitons faire la lumière sur la situation en nous appuyant sur le portrait de Thomas Neuhaus, élève informaticien du bâtiment en 3ème année d’apprentissage chez Etavis, avec pour spécialisation l’automation du bâtiment. Dans l’entreprise, il est également sollicité de temps à autre dans la spécialisation Communication et Multimédia, car ces deux spécialisations se recoupent sur certains points.


Texte: René Senn, Photos: Michael Donadel

Traitement rédactionnel: Domotech, Marc Schoeffel


Des partenaires cool!!! Dans les six articles parus en 2024 dans cette rubrique, nous avons mis l’accent sur des talents prometteurs et émergents de la branche électrique. Que pensent-ils, qu’espèrent-ils, quel est leur point de vue sur la branche électrique? Faites connaissance, chers lecteurs, avec des personnalités qui contribueront à façonner l’avenir de notre branche dynamique, passionnante et très porteuse. Tous les élèves dont nous avons fait le portrait contribuent par leur travail à ce que la transformation vers une Suisse neutre en CO2 puisse être entamée.

La relève est un investissement en l’avenir! Les entreprises suivantes soutiennent la promotion de la relève, dans le cadre de l’action « Nous sommes l’avenir » initiée par Domotech en collaboration avec EIT.swiss:

Nous avons rencontré Thomas Neuhaus et Patrick Bossard, responsable de la formation chez Etavis, sur un chantier situé Wienstrasse à Bâle.


Comment en es-tu arrivé à cette profession?

(Il rit) Bonne question. Quand j’étais en 2ème année de secondaire, je n’aurais jamais eu l’idée de devenir informaticien du bâtiment. À l’époque, j’avais fait mon stage d’observation en tant que menuisier. Mais j’avais remarqué à ce moment-là que le côté manuel n’est pas trop mon truc. J’ai alors regardé pour faire autre chose. C’est ce qui m’a amené au métier de planificateur-électricien. Comme il n’y avait pas de place disponible pour un planificateur-électricien chez Etavis, on m’a conseillé de commencer par la formation d’installateur-électricien et de poursuivre avec la formation de planificateur. J’ai fait mon stage d’observation et j’ai eu de bons retours de la part des installateurs. Mais peu de temps avant les vacances d’été, Patrick Bossard m’a conseillé la profession d’informaticien du bâtiment. Au niveau timing, il s’en est fallu de peu.

Patrick: Exactement. La question de l’informaticien du bâtiment s’est posée plus tard. Nous voulions proposer une deuxième place d’apprentissage pour que la classe de l’école professionnelle soit suffisamment grande. Nous avons cherché qui pourrait être candidat et nous avons pensé que ce serait un apprentissage qui conviendrait à Thomas.

Thomas: Ce qui a aussi fait pencher la balance, c’est que je ne pouvais pas m’imaginer me retrouver encore dans un atelier à 50 ans. C’est pourquoi j’ai pensé que ce serait mieux de faire quelque chose dans le domaine de l’informatique, pour pouvoir travailler dans un bureau. Et cela a été un bon choix.

Qu’apprécies-tu le plus dans ta profession?

J’apprends à connaître beaucoup de gens sympas. D’autres apprentis n’ont pas l’occasion de rencontrer des cadres d’EIT.swiss. Comme cette formation professionnelle est nouvelle, ils viennent dans les CI, ce qu’ils ne font sûrement pas chez les installateurs-électriciens.

Par le biais de cet apprentissage, tu fais aussi un peu partie d’une phase expérimentale. Ça ne te dérange pas?

Non, mais on le remarque un peu. Nous avons déjà commencé des modules qui n’étaient pas encore consignés par écrit, et cela a parfois été un peu difficile. Mais c’est passionnant de pouvoir contribuer à façonner l’ensemble, y compris pour les apprentis qui viendront après nous. Nous pouvons aussi donner notre feedback directement.

Patrick: Martin Stalder d’EIT.swiss vient de commencer avec les enquêtes dans les écoles et auprès des élèves. Tout est neuf pour tout le monde, même pour le personnel enseignant. L’orientation vers les compétences opérationnelles est également nouvelle, ce qui a constitué un double défi. Pour les apprentis actuels, c’est certainement une bonne chose qu’ils puissent participer à l’organisation et au développement de leur profession, ce qui n’est pas le cas pour les métiers dits « traditionnels ».


Quels sont les points forts que tu peux apporter à ce métier?

J’ai de bonnes bases en informatique, pas dans le domaine de la technique des réseaux, mais de manière générale. Je n’ai pas eu de mal à utiliser des appareils électroniques tels que téléphone portable ou PC, même si je n’ai reçu mon premier PC personnel qu’au début de mon apprentissage, sous forme d’un ordinateur portable scolaire. J’ai tout simplement des affinités avec cela et je me débrouille mieux avec le PC que mon père, par exemple, qui l’utilise tous les jours.

Tenir dans ma main pour la première fois, un ordinateur portable qui n’a encore jamais été utilisé, d’un bel éclat argenté et qui n’appartient qu’à moi, a été un moment spécial, presque magique. Avant, mon père me donnait toujours ces anciens appareils.

Quelle est ta tâche favorite?

Le paramétrage de KNX par exemple ou le paramétrage de composants de réseau. Pour deux ou trois projets, nous avons pu mettre en place nous-mêmes de A à Z, mais bien sûr sous surveillance, l’ensemble des extensions WLAN, y compris les switchs, les pare-feux, les points d’accès, etc. Comme produits, nous avons utilisé des pare-feu Zyxel et des points d’accès Ubiquiti ou des produits selon les besoins du client.

Quelles sont les tâches qui ont tendance à ne pas te motiver?

Comme je l’ai déjà dit, je ne suis pas très doué pour le travail manuel. Sur un ordinateur, je peux refaire cinq fois la même chose sans que cela ne m’ennuie, mais sur le chantier, ça peut m’arriver dès l’installation de la troisième prise... Mais il faut bien le faire. Le travail répétitif sur l’ordinateur m’affecte moins.

Patrick: Chez nous, les automaticiens doivent aussi aller sur les chantiers pendant six mois et tirer des câbles. Cela peut paraître ennuyeux, mais cela favorise la compréhension chez ceux qui ne sont « que » au bureau et qui disent souvent avec un peu de mépris aux gens du bâtiment « vas-y, ce n’est pas un problème ». Si on ne l’a pas fait soi-même, on ne sait pas ce que cela représente. C’est pour cela que nous débordons un peu du cadre du plan de formation.

Quand te sens-tu valorisé dans ton travail?

Par les clients, quand ils viennent sur le chantier, regardent le travail effectué et qu’ils ne se plaignent pas pour chaque petit détail qui n’est pas encore tout à fait au point. Et par les collègues et l’employeur, quand nous nous réunissons à la fin d’un projet et que nous discutons en toute décontraction de la manière dont ça s’est déroulé. Et bien sûr, quand on me fait un compliment sur mon travail que j’ai éventuellement bien réussi malgré des circonstances défavorables. C’est toujours agréable!

Y-a-t-il une expérience particulière ou une histoire vécue dans ta formation jusqu’à présent que tu aimerais partager avec nous?

Ce sont certainement les rencontres avec les cadres d’EIT.swiss. Cela représente beaucoup pour moi de pouvoir travailler en étroite collaboration avec les gens du bureau. Je pense qu’en tant qu’installateur-électricien, je serais « coupé » de ces personnes. Je tutoie tout le monde à Muttenz, nous nous entendons bien et nous pouvons nous demander des choses les uns aux autres. En tant qu’installateur-électricien, je ne pourrais sans doute pas me pointer simplement dans leur bureau et les assommer de questions.

Est-ce que tu n’entres pas dans un rôle privilégié que les autres ne trouvent pas si cool que ça?

Oui, c’est difficile, mais je crois que j’y arriverai. Un chef de projet m’a aussi dit qu’il vouvoie les autres apprentis mais qu’avec moi le tutoiement serait ok.

Patrick: De manière générale, nous vouvoyons les apprentis et ce n’est qu’après l’EFA que nous trinquons ensemble et que nous nous tutoyons. Il s’agit d’un moment spécial, un peu comme une étape franchie. Mais sur les chantiers, tout le monde se tutoie. C’était toujours le cas.

Qu’est-ce qui rend ton entreprise particulièrement remarquable?

Elle soutient très bien les apprentis. Je n’y ai pas encore eu recours, mais il existe de nombreux programmes de soutien, par exemple pour la culture générale. On peut poser des questions partout.

Nous avons également participé à un camp en début d’apprentissage dans l’Oberland bernois, auquel environ 120 apprentis ont pris part. On y a principalement abordé la question de la sécurité au travail.

Patrick: Actuellement, nous avons huit jours d’introduction avant de commencer l’apprentissage, d’abord trois jours de thèmes généraux, puis cinq jours de travaux pratiques axés sur la sécurité au travail.

Le salaire te convient?

Je vis encore chez mes parents qui paient la plupart des choses.

Patrick: Chez Etavis, tous les apprentis dans toutes les professions reçoivent le même salaire. L’argent n’est pas non plus ce qui est le plus important. Ce sont surtout les autres prestations qui priment: chez nous, tous reçoivent l’abonnement régional pour les transports publics, ils ont six semaines de vacances, nous avons des services de conseil, des cours de soutien et offrons un soutien pour les championnats professionnels. Mais ce n’est de loin pas le cas de toutes les entreprises.


Dans la branche de l’électricité, quelle est pour toi l’innovation la plus grande de ces dernières années?

Tous les systèmes ADB. Ils existent certes depuis longtemps, mais ces dernières années, ils ont encore fait un bond en avant du point de vue de la technique.  Nous en avons justement parlé pendant notre dernier CI à Lucerne. Un capteur capable de détecter une présence sans caméra, de mesurer la qualité de l’air, l’humidité et la température, ainsi que de reconnaître cinq pathologies générales et de recommander ensuite de consulter un médecin de famille devrait bientôt être commercialisé.

De ton point de vue, que devrait améliorer le secteur de l’électricité?

Il devrait plus s’occuper du manque de main d'œuvre, faire en sorte que les formations professionnelles soient plus attractives et que les gens restent dans la profession. Il faut pour cela que les salaires soient plus élevés, beaucoup d’installateurs-électriciens ne gagnent pas très bien leur vie. On n’en parle pas, mais d’après ce que j’ai entendu dans d’autres entreprises, beaucoup travaillent pour une bouchée de pain. De plus, ils se fatiguent tous les jours sur le chantier et ne sont pas suffisamment valorisés pour cela, même par les clients. De nombreux clients considèrent le travail comme allant de soi et oublient l’homme qui se trouve derrière. On s’acharne sur les erreurs, au lieu de le dire quand quelque chose fonctionne et que le client est satisfait. Il manque parfois de vivre-ensemble.

Patrick: Je peux confirmer cela. Tout doit simplement fonctionner et ce que cela implique n’a aucune importance pour les clients. La valorisation fait totalement défaut.

Trouves-tu que tu exerces un métier moderne ou plutôt traditionnel?

C’est un métier modernisé. Avant, les installateurs-électriciens faisaient tout. Aujourd’hui, ils devraient connaitre toutes les normes et savoir installer Logo, SPS et KNX. Personne ne peut couvrir tout cela.

Patrick: Je trouve que c’est une vision intéressante des choses.

Trouves-tu grave de ne pas avoir toutes les connaissances d’un installateur-électricien?

Je suis aussi sur le chantier et j’entends donc ce qui est le plus nécessaire, contrairement à un informaticien qui n’est qu’au bureau. Je trouve que la « répartition » des connaissances est bonne. Je dois savoir comment quelque chose fonctionne et où va un câble, mais pas forcément comment le poser.

Es-tu en contact avec des apprentis dans d’autres branches?

J’ai un collègue qui apprend installateur-électricien. C’est là que je vois à quel point la philosophie et les relations entre les entreprises peuvent être différentes. Je connais aussi un polymécanicien. Ils doivent être très, très précis, je suis content que ce ne soit pas le cas pour moi.

Que souhaites-tu transmettre aux futurs apprentis?

L’apprentissage est difficile, mais ça vaut la peine. Il y a beaucoup de contenu scolaire, mais aussi beaucoup de pratique, on apprend les trois systèmes Logo, SPS et KNX en même temps, ce n’est pas rien. Il faut donc avoir envie d’être performant.

Que feras-tu à l’issue de ta formation de base?

Je commencerai sûrement par mon service militaire. Ensuite, je ne sais pas encore si je resterai dans ce métier ou si je me dirigerai plutôt vers l’informatique. Mais les perspective sont bonnes, car il n’y a pas encore beaucoup d’informaticiens du bâtiment ce qui facilite la recherche d’un poste.

Je ne pense pas qu’il y aura beaucoup plus d’informaticiens du bâtiment formés dans les années à venir. Leur marché, ce sont principalement les immeubles de bureaux, et à un moment donné, ils seront tous automatisés, il n’y a donc pas besoin d’un nombre infini d’informaticiens du bâtiment.

Quelle est l’étendue de tes connaissances dans les domaines du réseau et de l’automatisation, 100 représentant le niveau le plus élevé?

Pour l’automatisation, je dirais environ 60, car je n’ai pas encore beaucoup d’expérience en la matière. J’ai tout de même l’impression que je ne suis pas loin derrière les collègues qui travaillent beaucoup dans ce domaine. C’est ce que j’ai remarqué lors du dernier CI. Pour ce qui est du réseau, je me situe à 80 ou 90. Je comprends très bien les concepts, parfois, je ne sais tout simplement pas pourquoi on règle un composant exactement de cette manière et pas autrement.

Dans quels domaines as-tu déjà pu apprendre quelque chose (un peu) en tant que personne?

En ce qui concerne les compétences sociales. Je l’ai peut-être aussi appris grâce au volley, mais avant cet apprentissage, je n’aurais pas émis un seul son pendant cette interview. Maintenant, je peux m’exprimer avec assurance et mettre de l’ordre dans mes idées avant de parler. Cela m’aide aussi avec les clients, quand ils se plaignent.

La situation générale dans le monde te préoccupe-t-elle?

Moins maintenant. En raison de toutes ces mauvaises nouvelles, j’ai effacé la plupart des applis d’infos. Je me sens aussi mieux comme ça, je n’ai pas besoin de savoir tout ce qui se passe de mauvais dans le monde. Les médias se concentrent trop sur tout ce qui est négatif.


Plutôt ceci ou cela?

Courant fort ou courant faible? Courant faible

Téléphone portable ou voiture? Téléphone portable, car les voitures ne m’intéressent pas.

Plus d’argent ou plus de vacances?

Pendant mon apprentissage, sûrement les vacances, parce que c’était un peu difficile de tomber à 5 semaines de congés, alors qu’on en avait 13 à l'école.

Sport ou détente? Cela dépend de ce qu’on appelle détente. Je joue avec beaucoup de jeux vidéos. Donc détente et sport.

Île ou grande ville? Île. Les grandes villes sont bruyantes et sentent mauvais.

Film ou série? Je préfère regarder des séries, parce que l’on apprend à mieux connaître les personnages et que l’on crée quasiment une relation avec eux.

L’ananas sur les pizzas, à enlever ou c’est bon? À enlever dans tous les cas!

Prénom

Thomas

Nom

Neuhaus

Âge

18

Loisirs

Volley, jeux vidéos

Module préféré dans l’école professionnelle

Dernier CI sur le thème de l’ADB

Formule préférée en électrotechnique?

U=R*I

Note souhaitée pour l’examen final?

Au moins 4,8 et jusqu’à 5

Temps passé sur le smartphone par jour

3h, y compris écouter

de la musique.

La musique la plus écoutée cette année?

Indifférent

Livre/film/série préféré?

Supernatural, il y a 15 saisons :)

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